Collection personnelle


complétée par des documents gentiment offerts

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Le Chateau de Walincourt
construit en 1735
a priori par l'architecte Michel François Playez (Douai)




Aquarelles réalisées en 1810 et 1812 par
Sophie de Fagan
fille de Marie Thérèse de la Woestine et François Charles de Fagan



"... en souvenir des heureuses années passées à Walincourt ..."


Fron "Album of Sophie Coronini Cronberg de Fagan (1792-1857)".
Property of Fondazione Palazzo Coronini Cronberg,
Gorizia (Italia).

Documents gentiment offerts par Serenella







.: Sur les traces de Sophie :.


Elle vient au monde dans un hôtel particulier du faubourg St Germain le 2 mai 1792. Son grand-père, François Maximilien Becelaer, marquis de la Woestine, seigneur de Walincourt et de bien d'autres lieux, a dû se réfugier en son hôtel particulier de Cambrai (actuellement 58 rue des Rôtisseurs) le 8 mai 1789 après le sac de son château de Walincourt par ses paysans affamés. La grand-mère de Sophie est feue Eléonora Conbenzl née vers 1740 à Bruxelles mais de noblesse autrichienne.

Sophie a pour père François Fagan, chevalier de St Louis, officier en garnison à Cambrai en 1788, bien connu dans cette ville pour son inconduite. Marie-Thérèse, née contesse de la Woestine, est sa maman, tandis que deux frères et soeur se penchent sur son berceau : Pauline, née en 1789 et Edwin qui mourra tragiquement en 1829.

Au plus fort de la révolution, les Fagan se réfugient à Vienne dans la famille maternelle de Marie-Thérèse puisque déclarés là-bas : "vivants et demeurant présentement à Vienne".

Dès le début du premier empire, ils reviennent à Walincourt où, en 1810, Sophie réalise une aquarelle représentant la façade Nord-Ouest du château. Certes le dessin est approximatif : il manque par exemple le majestueux escalier menant à la terrasse du rez-de-chaussée mais Sophie, qui aimera toujours la poésie, y ajoute ce charmant quatrain :

"Berceau de mon enfance, où je voudrais mourir,
J'emporte, quand je te quitte,
Sous mes yeux ton souvenir,
Et dans mon coeur, qui t'habite."

(NDLR. Le château a été construit en 1735 à cheval sur la rue Jules Ferry, alors allée du château, à la hauteur des n° 16, 18 ....Lors de l'installation du tout-à-l'égoût vers 1960, une pelleteuse a d'ailleurs mis au jour la voûte en ogive d'une cave de cet édifice et il existait encore, à la même époque, à 10 mètres du pignon sud de la salle des fêtes, un puits où les jardiniers du château devaient venir s'approvisionner en eau).

En 1812, on parle mariage autour de Sophie qui a rencontré à l'ambassade d'Autriche à Paris un jeune (19 ans) et bel "attaché" du nom de Michele, comte Coronini Cromberg. Sophie, toute à son bonheur, écrit cette fois sur l'aquarelle reproduisant la façade Sud-Est du château :

"Le plaisir vole, il fuit ... Qui peut le retenir ?
Et la félicité n'est que trop tôt passée !
Mais l'image d'un gite, à la tendre pensée,
En retrace lontem(p)s le plus doux souvenir.

Dans ces lieux, où règnait la gaîté sans délire,
L'hymen vint, certain jour, me proposer ses loix...
J'acceptai, je jouis, ... En ne cesse de dire
Je suis heureuse de mon choix."


Elle signe de la date du mariage célébré à Vienne : 26.8.1812
(calendrier romain : lire 26 Octobre 1812 du calendrier républicain).

Il n'est pas sûr que le mari ait fait le même "choix" que sa jeune épouse. En effet, Michele est fils unique, héritier de la propriété de ses parents : la villa Coronini Cronberg sis à Gorizia en Vénétie Julienne au Nord Est de Venise. Cette villa (30 pièces) est entourée d'un parc de 5 hectares. Par delà le mur d'enceinte s'étend un immense domaine, propriété de la famille Cobenzl de Vienne dont le dernier propriétaire vient de décéder (1809). Il s'agit de Ludwig Cobenzl, un proche de l'empereur d'Autriche, Ambassadeur à St Petersbourg de 1779 à 1797 - c'est lui qui signe le traité de Campoformio (1797) par lequel l'Autriche cède la Belgique (actuelle) à la France en échange de la Vénétie Julienne qui convoite l'Autriche depuis longtemps. Il est encore vice-chancelier de 1801 à 1805 au moment du désastre d'Austerlitz. Ce haut dignitaire n'ayant pas de descendance directe, il se trouve que Sophie doit pour partie, tout au moins, hériter par sa grand-mère, née Cobenzl, de ce grand-oncle. Michele ne peut donc que se féliciter de son mariage.

Dans le même temps, il a intenté un long et très onéreux procès à l'encontre d'une prétendante inattendue à l'héritage de sa propre grand-mère Rabatta. En jeu, le prestigieux palais Rabatta de Gorizia.

Sophie, que ces questions financières n'intéressent pas, revient à Walincourt pour mettre au monde Alfredo en 1814 (il ne vivra pas) et Ernesto en 1815. Puis, le 22 Août 1816, naîtra Mathilde et enfin en 1818, Carlo.

Dans sa correspondance, Sophie dira se sentir très malaimée de Michele, malgré ses lettres nombreuses, et souffrir d'être seule à veiller sur la santé de ses enfants. C'est l'époque où la variole fait encore de nombreuses victimes et Mathilde a résisté à trois vaccinations successives.

Revenue à Gorizia, elle décide de confier ses garçons à une préceptrice et sa fille aux Ursulines et part visiter seule - parfois avec Michele - ses relations. A Londres, ce sont les Wingfield et à Paris les Bourbons : la duchesse d'Angoulême, le duc de Berry, le comte de Chambord. A tous ces amis, elle ne manque pas de vanter la douceur des hivers de la Vénésie julienne et le charme de ses paysages. Elle visite aussi Genève, Prague, Trieste, Venise et fréquente une station thermale à la mode : Neuhaus (Celje).

Michele est le plus souvent à Vienne pour ses affaires et pour son plaisir. Ainsi, quand Sophie apprend à Paris en 1820 que l'héritage Cobenzl est enfin acquis, elle accourt à Gorizia mais Michele est déjà reparti pour Vienne. Pourtant, les voilà propriétaires de la colline de Grafenberg, de son château, de ses vignes et de toute la Carniola supérieure où ils bénéficient d'importants droits juridictionnels.

A Gorizia, l'hiver, les aristocrates désoeuvrés venus de France, d'Angleterre, d'Autriche organisent fêtes et bals même pendant la période de Carême, ce qui provoque l'indignation de la presse locale catholique. Sophie assiste à ces réjouissances, organise aussi des loteries dans le but de créer un asile pour les enfants pauvres de la ville. Pour son action charitable, elle recevra une distinction : "Dame de l'Ordre de la Croix Etoilée".

Michele préfère fréquenter les salons mondains où il brille par sa magnificence mais sa prodigalité l'oblige à s'endetter de plus en plus. Si bien qu'à partir de 1830, les Coronini connaîtront de longues années noires.

1825. Marie-Thérèse de la Woestine, mère de Sophie, meurt à Paris le 26 Septembre. Son mari Fagan avait disparu en 1813 (séparation de corps et de biens ?).

1826. Dans une lettre datée de Cambrai (16.6.1826), Edwin informe Sophie qu'il lui a expédié de Calais le 2 Juin - conformément au voeu exprimé par leur mère le 21.2.1825 - une pendule supportée par deux bronzes dorés "Orphée et Eurydice" reposant sur un socle de marbre rose. Le colis arrivera à Trieste le 23 Juin.

1827. Pauline, la soeur aînée, épouse Gabriel François de Sampigny d'Issoncourt et ira vivre au château de Font-Blachère à St Lager Bressac (Ardèche). Elle n'aura pas de descendance.

1828. Le château familial est vendu. L'acquéreur en fera une carrière de pierres et vendra le parc ainsi que la garenne (le Bois du Parc) en parcelles telles que nous les connaissons encore aujourd'hui.

1829. Edwin fait une chute mortelle de cheval en rendant visite à sa fiancée Charlotte d'Issoudun (une des filles du duc de Berry). Il était lancier dans les Gardes du Corps de Charles X, frère de Louis XVI.

1836. Chassé de France après les 3 Glorieuses de 1830, Charles X a entrepris une longue pérégrination de l'Ecosse jusqu'à Prague. Début Octobre, le roi déchu - et sa suite - vient frapper à la porte du château de Grafenberg. Il n'y restera qu'un mois, emporté par la maladie (le choléra ?).

1857. En Janvier, lors d'un voyage à Venis, Sophie tombe malade. Malgré le recours à plusieurs médecins, malgré les remèdes recueillis auprès des paysans ardéchois et envoyés par Pauline, Sophie meurt le 2 Mai.

Mathilde n'adoptera pas la vie mondaine de sa mère. On ne la verra que lors de cérémonies religieuses, passant son temps dans sa roseraie, recevant à sa table les autorités religieuses de l'archevêché de Gorizia. Avec l'aide financière de la duchesse d'Angoulême, elle créera un hôpital pour femmes qu'elle confiera, pour son fonctionnement, à des religieuses venues d'Innsbruck : les "soeurs grises" comme elle les appellera en français. Elle vivra jusqu'en 1901.

Son frère Ernesto sera compositeur et musicien à la suite de Johann Strauss (fils). Quant à Carlo, il exercera ses talents de poète, comme sa mère, mais se lancera dans la politique et d'administration territoriale. Pour avoir déjoué un attentat ourdi contre Napoléon III, il recevra la Légion d'Honneur.

Leur père, le 29 Mai 1876, aura une fin peu glorieuse. Il mourra seul, inconnu, dans une chambre d'hôtel Valparaiso, 45 rue de Seine à Paris.

En 1990 disparaîtra Guglielmo Coronini, le dernier des trois arrière-petits enfants de Sophie. Les archives familiales seront alors ouvertes. On y trouvera, outre les aquarelles de Sophie, son album intime relié de cuir noir et frappé de la lettre S.

Rédigé de 1810 à 1825, Sophie y relate les événements de sa vie en prose ou en vers. Elle y a aussi gardé une lettre signée de Félix Rhem, chevalier de la Légion d'Honneur, capitaine dans la Légion de la Garde de Charles X. Au bas du billet, l'auteur a dessiné une énigmatique église gothique en ruines.

Pour que les objets familiers des Coronini ne soient pas dispersés, une Fondation Coronini Cronberg a été créée et un musée installé dans le palais, berceau de la famille. On peut y voir le buste en marbre blanc de Carare de Michele, les portraits peints de Sophie et de son mari, une "Madonna" achetée à Venise par l'aïeule Eléonora Cobenzl pour sa fille Marie-Thérèse qui l'a transmise à la sienne, qui ... Etc ..., des toiles de Vigée-Lebrun, Rubens, Monet, Rembrandt, des meubles de Charles X, une bibliothèque de 15.000 livres et incunables, etc ...

Quant au parc qui entoure la villa, il abrite, plantés par Alfredo (petit-fils de Sophie), de façon très romantique, 23 espèces d'arbres aux essences méditerranéennes et exotiques.


D'une famille aristocratique peu ordinaire, voilà retracé en quelques pages le parcours commencé à Walincourt vers 1790 et achevé 200 ans plus tard à Gorizia à la frontière italo-yougoslave.




Fernand TOFFIN


Bibliographie

"Mathilde Coronini Cronberg"
Par Serenella Ferrari-Benedetti
Pour la Fondation Palazzo Coronini Cronberg
Gorizia (Italia) - 2005.




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Le château de Walincourt n'existe plus aujourd'hui,
remplacé dans la rue Jules Ferry par de multiples habitations.

Il existe à Avesnes-le-Sec un château habité jusqu'après la guerre 39-45 mais en ruines maintenant et dont la façade (côté jardin) est absolument identique à la façade (côté jardin) du château de Walincourt.
L'architecte serait MF Playez, très en vogue alors à Cambrai (maison du gouverneur, etc ...)


Avesnes-le-Sec






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Vue extérieure de Walincourt
1950

la mairie
Rue Jules Ferry
la salle des fêtes
L'Eglise Saint Pierre
L'école maternelle
Rue Pierre Flinois

place et rue du chateau
- la place du village -
Rue Faidherbe
Rue de Malincourt
La coopérative agricole.
Quartier de la Gare



Jeanne d'Arc, fièrement représentée par Suzon lors de la procession du village
(collection personnelle)



A la sortie de la bijouterie



Le Moulin de Déheries







Le monument aux morts de Walincourt




le carrefour Faidherbe




la grande rue
(appelée aussi "les quatre rues")




le quartier latin
(en haut du village)





rue et quartier de la gare






le monument aux morts et vue sur "les quatre rues" ...




rue Pierre Flinois




rue du bois





vues aériennes du village












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